Il n’y aura plus que ça, la demande sera telle que… il n’y aura plus que des réponses, tous les textes seront des réponses en somme. Je crois que l’homme sera littéralement noyé dans l’information, dans une information constante. Sur son corps, sur son devenir corporel, sur sa santé, sur sa vie familiale, sur son salaire, sur son loisir. C’est pas loin du cauchemar. Il n’y aura plus personne pour lire. Ils verront de la télévision, on aura des postes partout, dans la cuisine, dans les water closets, dans les bureaux, dans les rues… Où sera-t-on ? Tandis qu’on regarde la télévision où est-on ? On n’est pas seul. On ne voyagera plus, ce ne sera plus la peine de voyager. Quand on peut faire le tour du Monde en huit jours ou quinze jours, pourquoi le faire ? Dans le voyage il y a le temps du voyage. C’est pas voir vite, c’est voir et vivre en même temps. Vivre du voyage ; ça ne sera plus possible. Tout sera bouché. Tout sera investi.
Il restera la mer quand même. Les océans. Et puis la lecture. Les gens vont redécouvrir ça. Un homme un jour il lira. Tout recommencera. On repassera par la gratuité. C’est à dire que les réponses à ce moment-là, elles seront moins écoutées. Ça commencera comme ça, par une indiscipline, un risque pris par l’homme envers lui-même. Un jour il sera seul de nouveau avec son malheur, et son bonheur, mais qui lui viendront de lui-même.
Marguerite Duras, questionnée sur l'an 2000, en 1985
Il restera la mer quand même. Les océans. Et puis la lecture. Les gens vont redécouvrir ça. Un homme un jour il lira. Tout recommencera. On repassera par la gratuité. C’est à dire que les réponses à ce moment-là, elles seront moins écoutées. Ça commencera comme ça, par une indiscipline, un risque pris par l’homme envers lui-même. Un jour il sera seul de nouveau avec son malheur, et son bonheur, mais qui lui viendront de lui-même.
Marguerite Duras, questionnée sur l'an 2000, en 1985
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