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Sunday, December 11, 2011

Le Père de la Horde sauvage

Un jour, les frères expulsés se groupèrent, abattirent et consommèrent le père et mirent ainsi un terme à la horde paternelle. Réunis, ils osèrent et accomplirent ce qui était resté impossible à l'individu. (Peut-être un progrès culturel, le maniement d'une nouvelle arme, leur avait-il donné le sentiment de leur supériorité.) Qu'ils aient ainsi consommé celui qu'ils avaient tué, cela s'entend, s'agissant de sauvages cannibales. Le père primitif violent avait été certainement le modèle envié et redouté de tout un chacun dans la troupe des frères. Dès lors ils parvenaient, dans l'acte de consommer, à l'identification avec lui, tout un chacun s'appropriant une partie de sa force. Le repas totémique, peut-être la première fête de l'humanité, serait la répétition et la cérémonie commémorative de cet acte criminel mémorable, par lequel tant de choses prirent leur commencement, les organisations sociales, les restrictions morales et la religion.

Freud Sigmund, Totem et tabou, 1913

Totem : "Le mot totem est emprunté à l'ojibwa, langue algonquine parlée sur le pourtour des Grands Lacs nord-américains..." E. Désveaux dans Dictionnaire de l'ethnologie et de l'anthropologie de Bonte et Izard.

Tabou : Il semblerait que le mot fût connu et introduit en Occident par le récit du troisième voyage de James Cook. Il l'aurait entendu à Tonga. Aujourd'hui encore à Tahiti on parle de tapu. Comme pour totem, les usages ethnologiques ont quelque peu déplacé les sens de ces mots par rapport à leurs usages dans leurs langues originelles.

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